RAPPORT SCIENTIFIQUE DU CNRS, JUIN 2011

Les satellites à l’assaut de l’Univers
Dédié à la traque des exoplanètes, le satellite CoRoT a identifié en 2010 sept nouveaux corps célestes. De son côté, le satellite européen Planck a livré sa première image du ciel dans on intégralité. Un ciel également scruté par l’observatoire spatial européen Herschel, et bientôt par le petit satellite de poche Robusta.

CoRoT
DÉCOUVERTE DE NOUVEAUX CORPS CÉLESTES
Dédié à la traque des exoplanètes, le satellite CoRoT  du Cnes s’appuie sur le phénomène de transit astronomique, qui consiste à repérer  le passage d’une planète devant son étoile. L’observation de ces transits est relayée par des observations au sol, notamment avec des spectrographes, permettant d’obtenir une mesure précise de la taille, de la masse et de l’orbite de ces nouvelles planètes. CoRoT est ainsi parvenu à identifier en 2010 sept nouveaux corps célestes, dont une naine brune – objet situé entre la planète géante et l’étoile – d’une masse soixante fois supérieure à celle de Jupiter. L’observatoire spatial a fait une découverte encore plus originale : une planète géante tempérée. Baptisé CoRoT-9b, ce corps de la taille de Jupiter et de la même orbite que Mercure, est assez semblable aux planètes de notre système solaire. Son étude approfondie a permis de préciser la température de son atmosphère gazeuse, comprise entre -20 et +150 °C.
Publié dans Nature le 18 mars 2010

Sismologie stellaire
UNE ÉTOILE À L’ACTIVITÉ MAGNÉTIQUE ANALOGUE À CELLE DU SOLEIL
Les données recueillies par le satellite d’observation CoRot ont permis de déceler dans une étoile éloignée de 100 années lumières un cycle d’activité magnétique analogue à celui du soleil. Obtenue pour la première fois à partir de la technique de sismologie stellaire, qui permet d’ausculter des étoiles lointaines, cette observation ouvre la voie à des centaines d’autres. L’enjeu : mieux comprendre comment les cycles d’activité magnétique diffèrent d’une étoile à l’autre.
Publié dans Science le 27 août 2010

Histoire de l’Univers
CINQ GALAXIES À LA LOUPE
Grâce à l’observatoire spatial  Herschel de l’agence spatiale européenne et à des observations au sol, une équipe internationale d’astronomes vient de mesurer l’éloignement exact de cinq galaxies très lointaines, en démontrant que la lumière de ces galaxies avait dû voyager pendant environ dix milliards d’années avant de nous atteindre. Pour parvenir à ce résultat, ils ont utilisé un phénomène appelé « lentille gravitationnelle », sorte de loupe cosmique qui amplifie le rayonnement de certaines galaxies lointaines.
Publié dans Science le 5 novembre 2005

Planck
UNE BELLE MOISSON DE RÉSULTATS
2010 est l’année des découvertes en cascade pour la mission Planck de l’Agence spatiale européenne. Conçu pour cartographier le rayonnement cosmologique fossile, une sorte d’écho lumineux du Big Bang, ce satellite fournira la représentation la plus détaillée jamais obtenue de l’Univers primordial. Son atout : la capacité à produire des images du ciel en neuf « couleurs » dans le domaine des ondes millimétriques. Planck a d’ores et déjà livré, en juin 2010, son premier relevé intégral du ciel sur les cinq prévus d’ici 2012. Cette première image de la série met en évidence de manière spectaculaire les deux sources de rayonnement du ciel les plus abondantes dans le domaine des micro-ondes : la Voie Lactée et le rayonnement cosmologique fossile. En traquant les photons issus de ce dernier, le satellite  a également permis de découvrir un superamas de galaxies grâce à son empreinte sur le rayonnement fossile. Les amas de galaxies, plus grandes structures connues de l’Univers, se sont formés à ses prémices et leur étude permettra donc de retracer son évolution. Enfin, Planck a obtenu des clichés de nuages filamentaires dans notre Galaxie, révélant la structure du milieu interstellaire de la Voie Lactée.

La science au service de l’art
La science aime l’art : les dernières innovations de l’électrochimie moderne ou de l’analyse par spectroscopie permettent de retrouver les vertus médicinales des fards des anciens Égyptiens ou de révéler, sans altérer les œuvres, les secrets d’un tableau ou d’un violon. 

Musique
DANS LE VERNIS, LE SAVOIR-FAIRE DU LUTHIER
Le mystère autour de la sonorité inégalable des violons conçus par Antonio Stradivarius se dissipe quelque peu. Des scientifiques ont mis au point une séquence de techniques d’analyses spectrométriques pour accéder à la stratigraphie et à la composition organique et inorganique du vernis de cinq violons fabriqués par le célèbre luthier italien. Ils ont  montré que ce vernis comportait toujours deux strates de compositions organiques similaires. La plus profonde est à base d’huile siccative, une substance qui accélère le séchage des vernis. Pour la couche superficielle, ce même produit est associé à une résine provenant d’arbres de la famille des Pinacées. Des informations qui viennent en partie combler un vide : jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, aucune source historique connue ne décrit les matériaux, outils et procédés utilisé pour vernir les instruments.
Publié dans Angewandte Chemie International Edition le 4 janvier 2010

Égyptologie
SE FARDER POUR SE PROTÉGER
Les anciens Egyptiens avaient pour coutume de rehausser leur regard par une épaisse couche de fard. Mais ce maquillage n’avait pas qu’un simple rôle esthétique. Synthétisé à partir de sels de  plomb, il avait également des vertus médicales. Ce que confirme une étude sur la laurionite, un chlorure de plomb qui entrait dans la composition des maquillages égyptiens.  À l’aide d’ultramicroélectrodes, les chercheurs ont pu étudier les réactions chimiques survenant sur une cellule de la peau mise en contact avec une solution de laurionite. Ils ont ainsi constaté une augmentation très nette de la production de monoxyde d’azote, composé chimique connu pour stimuler notre système immunitaire. Le fard des Egyptiens déclenchait donc un mécanisme de défense qui, en cas d’infection oculaire, limitait la prolifération  des bactéries.
Publié dans Analytical Chemistry le 15 janvier 2010

Sfumato
UNE TECHNIQUE PICTURALE DÉVOILÉE
Des chercheurs ont eu le privilège d’analyser sans prélèvement, directement dans les salles du Louvre, la composition et l’épaisseur de chaque couche de matière déposée par Léonard de Vinci sur sept de ses tableaux, dont la Joconde. Ils ont ainsi pu percer les secrets du « sfumato », technique picturale qui a permis à l’artiste de réaliser les ombres des visages de ces tableaux. La superposition de quelques dizaines de couches de peinture fines de 1 à 2 micromètres ainsi que la nature des pigments auraient largement contribué à rendre les œuvres du maître aussi vivantes.
Publié dans Angewandte Chemie International Edition le 14 juillet 2010

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