RECHERCHE & SANTÉ, NUMÉRO SPÉCIAL, AOÛT 2013
Mélanome : les clés pour un traitement plus efficace
L’équipe de François Ghiringhelli (centre Georges-François-Leclerc, Dijon) vient de comprendre pourquoi la chimiothérapie n’est pas efficace chez tous les patients atteints de mélanome. Ce résultat a pu être obtenu grâce au soutien de la Fondation, qui lui a attribué en 2011 le label « Équipe FRM » et un financement de 300 000 euros sur 3 ans.
Améliorer l’efficacité de la chimiothérapie en agissant sur le système immunitaire, voilà l’enjeu des recherches menées par l’équipe de François Ghiringhelli. Les chercheurs se sont notamment penchés sur le mélanome, ce cancer de la peau qui touche environ 10 000 malades chaque année. La forme sévère du mélanome, qui produit des métastases, est souvent traitée par chimiothérapie à base de dacarbazine (DTIC). Ce traitement est cependant moins efficace contre le cancer de la peau qu’il ne l’est pour d’autres cancers. D’où la nécessité de l’améliorer. Le chercheur et son équipe ont étudié les effets de cette chimiothérapie sur le système immunitaire de souris ayant développé des mélanomes. Ils ont constaté que la chimiothérapie était incapable de freiner la croissance du mélanome chez des souris dont le système immunitaire était affaibli. Ainsi, ce sont les défaillances du système immunitaire qui expliqueraient pourquoi l’efficacité de ce traitement varie. « Mais, contrairement à ce que l’on supposait, la DTIC n’intervient pas directement sur les cellules du système immunitaire, précise le chercheur. En fait, elle favorise l’augmentation du nombre de protéines situées à la surface des cellules cancéreuses. Celles-ci sont ensuite la cible de cellules immunitaires tueuses, les lymphocytes T CD8 et NK. La destruction des tumeurs par le système immunitaire est ainsi facilitée. En combinant la DTIC avec un autre médicament stimulant la réponse immunitaire du patient, nous pourrions donc améliorer l’efficacité du traitement », renchérit le chercheur qui envisage désormais de déterminer le profil des malades susceptibles de tirer bénéfice d’une telle association.
Système immunitaire : système de défense de l’organisme contre les corps étrangers (virus, bactéries, parasites, tumeurs…).
Métastases : tumeurs secondaires issues de cellules cancéreuses qui se sont échappées de la tumeur d’origine, ici le mélanome, pour atteindre d’autres organes.
Lutter contre l’hypertension artérielle en agissant sur la moelle osseuse
Près de 7 000 maladies sont dites rares, et chacune touche moins d’une personne sur 2 000. Tous les ans, on en découvre de nouvelles. La Fondation ne les oublie pas et finance régulièrement des recherches contre ces maladies peu connues. En 2006 et 2010 respectivement, elle a notamment soutenu les équipes de Luc Maroteaux et Marc Humbert, à hauteur de 619 600 euros, en leur attribuant le label « Équipe FRM ». Les résultats sont là : ils viennent d’élucider un mécanisme à l’origine de l’hypertension artérielle pulmonaire.
Luc Maroteaux et Marc Humbert travaillent sur l’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP), une maladie souvent mortelle, qui touche environ 600 Français par an. Elle provoque un rétrécissement progressif des petites artères des poumons, entraînant une augmentation de la pression sanguine. Des équipes de médecins et de chercheurs ont montré qu’il était possible d’enrayer cette maladie en bloquant une protéine située dans la moelle osseuse… alors qu’aujourd’hui le seul espoir des malades reste la transplantation cœur-poumon. Les récents travaux des équipes de Luc Maroteaux et Marc Humbert, soutenues par la Fondation, révèlent le rôle de cellules souches de la moelle osseuse dans l’HTAP. Les chercheurs supposent que l’action de la sérotonine sur certaines de ces cellules souches est à l’origine de la maladie car « la sérotonine est surtout stockée dans les plaquettes qui ont pour effet de contracter les vaisseaux. De plus, dans l’HTAP, sa quantité augmente dans le sang », explique Luc Maroteaux. Les chercheurs avaient déjà identifié une protéine située sur les cellules souches de la moelle osseuse qui, en fixant la sérotonine, permet leur différenciation en précurseurs de cellules vasculaires. Leur idée : modifier génétiquement des souris pour qu’elles ne fabriquent plus cette protéine, réduire la quantité de précurseurs produits par la moelle osseuse de ces rongeurs et donc la quantité dans leur sang, éviter ainsi que leurs vaisseaux ne s’épaississent et diminuer la pression artérielle. « En bloquant ainsi la protéine, on a pu contrecarrer les symptômes d’une HTAP provoquée en réduisant la quantité d’oxygène respirée par les souris », conclut le chercheur. Un traitement bloquant la protéine incriminée chez l’Homme pourrait donc permettre de prévenir la maladie.
Cellules souches de la moelle osseuse : cellules capables de s’autorenouveler et de donner naissance à toutes les cellules du sang : globules blancs, globules rouges et plaquettes.Stockées dans la moelle, elles circulent aussi en petite quantité dans le sang.
Sérotonine : molécule connue pour assurer la communication entre les neurones et réguler des fonctions comme le comportement ou le sommeil. Elle contracte les vaisseaux sanguins lorsqu’elle passe dans le sang.