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REPÈRES N°43, OCTOBRE 2019

L’ESSENTIEL Traiter certaines maladies bénignes de la thyroïde implique d’administrer de l’iode 131. La capacité de la glande à fixer le radioélément doit être mesurée pour déterminer l’activité thérapeutique à injecter. TÉMOIGNAGE Un spécialiste en médecine nucléaire des hôpitaux universitaires Paris-Sud. INFOGRAPHIE Comment les fantômes thyroïdiens sont-ils utilisés ? AVIS D’EXPERT La chercheuse en dosimétrie interne à l’origine de l’innovation.


TÉMOIGNAGE
– Emmanuel Durand Chef du service de biophysique et médecine nucléaire des hôpitaux universitaires Paris-Sud (Kremlin-Bicêtre, Val de Marne)

« La personnalisation du traitement pourrait limiter les effets secondaires »

Les hyperthyroïdies liées à la maladie auto-immune de Basedow sont des maladies bénignes de la thyroïde prises en charge par les services de médecine nucléaire. Trois types de traitements permettent de les soigner : la chirurgie, qui consiste à enlever tout ou partie de la thyroïde, l’administration de médicaments bloquant la fabrication des hormones thyroïdiennes, ou l’injection d’iode radioactif destiné à détruire totalement ou partiellement la glande. On utilise de l’iode 131 – émetteur béta et gamma avec 8 jours de période – à des activités de l’ordre de 500 MBq pour une irradiation locale d’environ 100 Gy. Notre service traite chaque année entre 50 et 100 patients hyperthyroïdiens avec ce traitement. Au niveau national, ils sont près de 10 000 à en bénéficier tous les ans. Pour qu’il soit efficace, il est nécessaire de vérifier, au préalable, que la thyroïde du patient capte le radioélément. Une scintigraphie réalisée avec un élément radiotraceur comme l’iode 123 permet au praticien de s’en assurer. Du taux de captation mesuré avec cet examen découle la quantité. d’iode 131 à injecter au patient pour traiter la maladie. L’utilisation de fantômes thyroïdiens offre aujourd’hui l’opportunité de calibrer avec une plus grande précision la gamma-caméra permettant d’acquérir une image fonctionnelle de la thyroïde. En améliorant l’étalonnage de la mesure de fixation thyroïdienne, ces dispositifs nous aident à déterminer la dose d’iode 131 qu’il convient d’administrer à chaque patient. Cette forme de « personnalisation thérapeutique » pourrait contribuer à limiter certains effets secondaires comme l’hypothyroïdie. Cette dernière se manifeste dans plus de la moitié des cas et souvent plusieurs années après le traitement.

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AVIS D’EXPERT – Tiffany Beaumont, chercheuse en dosimétrie interne à l’IRSN

Vers un calcul plus personnalisé de l’activité thérapeutique

Une évaluation précise de la fixation thyroïdienne est primordiale pour la personnalisation de l’activité thérapeutique. Or, en routine clinique, l’étalonnage est souvent réalisé avec des fantômes éloignés de la réalité. Cette simplification peut entraîner une surestimation non négligeable de l’activité thérapeutique d’iode 131 prescrite. Pour limiter ce risque, en collaboration avec l’hôpital Bicêtre (Île-de-France) et l’Oncopole de Toulouse (Haute-Garonne), l’Institut développe une méthode d’étalonnage et d’analyse plus précise basée sur le seuillage d’image¹. Elle améliore l’estimation de la fixation thyroïdienne afin d’aller vers un calcul plus personnalisé de l’activité. Adaptée et adaptable à la routine, son déploiement dans les services de médecine nucléaire devrait être facilité. Les premiers résultats montrent que l’activité pourrait être abaissée sans affecter l’efficacité du traitement. D’ici à trois ans, lorsque l’étude sera achevée, des recommandations seront publiées. L’Institut projette de lancer une intercomparaison nationale, en utilisant les fantômes thyroïdiens, afin de réaliser un état des lieux des pratiques françaises sur le mesure de fixation thyroïdienne.

  1. Technique permettant d’éliminer le rayonnement parasite.

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