GRAND PARIS DÉVELOPPEMENT N°7 , PRINTEMPS 2014
Fondée en 2003 par les architectes Marc Bigarnet et Frédéric Bonnet, l’agence d’architecture Obras travaille principalement sur les notions d’aménagement et de développement des territoires, de l’espace public et des paysages. Implantée à Paris et à Lyon, elle compte une douzaine d’architectes mène actuellement une quinzaine de projets de front, dont plusieurs en Île-de-France.
Entretien avec Frédéric Bonnet, architecte et cogérant de l’Agence Obras architectes
Votre agence est très engagée sur l’espace public à l’échelle de la ville et même au-delà. Quelle est sa philosophie dans ce domaine?
Nous pensons que l’espace public ne doit pas être dédié à des usages spécifiques, mais qu’il doit, au contraire, pouvoir évoluer et s’adapter. Nous n’hésitons pas par ailleurs à tirer profit de l’hétérogénéité du territoire dont on hérite. Ainsi, pour les projets d’aménagement urbain, nous prenons appui sur les structures existantes qu’il s’agisse d’axes routiers, de voies ferrées, de barres d’immeubles, d’usines ou de pavillons. Dernière cette démarche « adaptative » il y a la volonté de d’effacer le contraste entre ce qui est neuf et ce qui préexiste, mais aussi de limiter le surenchérissement du prix du foncier en évitant autant que possible la réalisation d’infrastructures trop complexes.
Quels sont, selon vous, les défis auxquels le Grand Paris va devoir faire face dans les années à venir?
La métropole parisienne telle qu’elle existe aujourd’hui est constituée d’une mosaïque de territoires plus ou moins urbanisés qui demeurent repliés sur eux-mêmes. De nombreux projets de zones d’aménagement concerté (Zac) fleurissent ainsi un peu partout sur le territoire du Grand Paris, mais leur mise en relation est défaillante. Il manque une échelle intermédiaire, des liens géographiques. Pour échapper à cette logique de repli sur soi, il est primordial de réorganiser l’espace public afin de créer de la continuité à la fois entre quartiers d’une même ville et entre les villes. Pour trouver ces attaches, qui vont au-delà des frontières communales, de nouveaux espaces publics restent encore à inventer, comme les lisières de rivières ou d’infrastructures, pour la promenade, mais aussi pour se rendre au travail, accéder aux équipements. Ce sont les liens métropolitains qui manquent partout.
Quelle sont quelques-unes des solutions imaginées par Obras architectes pour fluidifier les déplacements urbains?
Nous avons apporté notre expertise à l’EPA Orsa sur le projet de réaménagement de la zone d’activité du Senia, située au nord de l’aéroport d’Orly. Pour proposer une structure forte d’espaces publics qui complètent les infrastructures existantes, nous avons imaginé des promenades reliant les fragments épars de ce territoire de 120 hectares aux typologies contrastées. Cela permet de se projeter au-delà du seul territoire à aménager, afin d’assurer l’interface avec les villes voisines et d’allier la domesticité des quartiers principalement pavillonnaires à la clarté d’une grande figure métropolitaine. Il faut assumer cette double identité, qui est une chance. A Nanterre, nous avons mis au point avec l’Epadesa, la ville et l’ensemble des acteurs impliqués, le quartier de la gare de la Folie. Afin de ne pas surenchérir le coût des aménagements, nous avons proposé de laisser les voies ferrées à ciel ouvert. Le réseau d’espaces publics urbains, intégré au projet, tire ainsi bénéfice de la respiration offerte par le faisceau de voies ferrées et d’axes routiers, pour offrir des perspectives sur le paysage environnant. Enfin, des cheminements piétons, lisibles et continus connectent à la fois les quartiers de la ville et la Défense avec la Seine.